L\'Afrique peut!

L\'Afrique peut!

Des « griots-junior » aux « veilleurs- junior »

 

crédit image: article.wn.com

 

Dans mon pays, le Cameroun, j’ai  recensé plusieurs types de jeune que je classe en trois catégories : La première catégorie est celle des fanfarons qui, à l’image de leurs ainés, passent le temps à danser comme on le leur impose. Ensuite, il y’a ceux qui pensent agir pour  le bien de l’Afrique mais en posant le problème de l’Afrique toujours à partir de l’Europe, l’occident (Afrique idéale qu’on pille, occidentaux fautifs) et enfin, il y’a ces jeunes vaillants mais peu nombreux qui ont décidé, sous la houlette des ouvreurs d’imaginaire, de poser le problème de  l’Afrique à partir d’elle-même.

 

La démarche de ce billet est claire : partir d’une jeunesse qui n’a rien à dire pour esquisser ceux que je considère comme des modèles de jeunes. Je pars donc de la jeunesse fanfaronne pour aboutir à la jeunesse porteuse d’espoir.

 

La catégorie que je qualifie de jeunesse fanfaronne, c’est cette catégorie de jeunes qui a choisi délibérément de tourner le dos à son futur en s’inscrivant dans la même ligne que leurs parents et leurs ainés. Cela signifie que, pour eux, le Cameroun va très bien et il ne faut pas mettre les problèmes où il n’yen a pas. Très souvent vous les observez lors des meetings, des défilés ou des grands rassemblements du parti du renouveau. Ils arpentent les rues avec ces habits en disant « merci pour… », « La jeunesse Camerounaise dit non … », « les jeunes de tel village, tous unis derrière… ». Voila les éléments qui vous permettraient de les repérer. Ce sont des jeunes qui, dès que vous soulevez une question qui a trait au système en place, vous demandent de « faire attention », des jeunes qui n’ont qu’un souci danser comme leurs ainés pour manger et dormir sans imaginer et définir le long terme.  Dans les universités comme dans les grandes écoles, vous pouvez facilement les reconnaitre. Petit indice, regardez les le jour du défilé et dites-moi l’habit qu’ils portent. L’autre caractéristique de ces jeunes est la duplicité et l’hypocrisie.  Après avoir discuté avec certains d’entre eux, je me suis rendu compte qu’ils ne partageaient pas les idées pour lesquelles ils dansaient, mais ils dansaient quand même pour je ne sais quelles raisons.  Alors comment construire le Cameroun dans ces conditions ? Lorsqu’il y’a un problème, la seule chose qu’ils disent c’est « on va faire comment ? ». Ils ont définitivement abdiqué et démissionné de leurs responsabilités et se comportent désormais en marionnettes et « sans part » dans un pays qui leur appartient.  Pour reprendre les termes de certains intellectuels, ce sont des « jeunes griots » qui, derrière leurs ainés, « ne prennent aucune initiative mais se contentent de mettre la science au service d’un parti ».  Ils ne sont pas seuls dans la sphère jeune de notre pays.

 

Pour reconnaitre ces seconds que j’appellerai « jeunes illuminés pseudo panafricanistes », vous n’avez qu’à écouter  une émission à laquelle ils participent. En 60 secondes, comptez le nombre de fois que le terme « occident » a été prononcé et vous comprendrez qu’il s’agit bel et bien d’eux. Avec les évènements de cote d’ivoire et du nord de l’Afrique, beaucoup de jeunes camerounais sont devenus des spécialistes en lamentations Africaines convoquant ou invoquant chaque fois le panafricanisme et ressassant une Afrique idéalisée qui n’existe que dans leurs phantasmes personnels et leurs rêves. Lorsque vous discutez avec cette catégorie de jeunes, ils  vous disent qu’ils remettent tout en question « Dieu, la langue… » Mais qu’est ce qu’ils proposent ? Rien. Ils passent le temps à dire qu’ils aiment l’Afrique sans produire quelque chose de concret sur l’Afrique et en rejetant chaque fois la responsabilité de la lenteur de notre continent et notre pays à l’occident. Les choses vont mal, certes, mais ce ne sont pas nos leaders autocrates qui posent problème, c’est l’occident, c’est Dieu, c’est la langue qui posent problème. L’incohérence de leur discours n’est plus à démontrer dans la mesure où, ils n’appliquent jamais ce qu’ils disent : ils portent les mêmes prénoms, parlent des intellectuels occidentaux, se vêtissent en « jeans ». Le principal problème qu’ils ont est qu’ils analysent l’Afrique à moitié sans prendre en compte les faits historiques et, dans leur phantasme, le continent idéal serait l’Afrique. Un continent saint, sans plaies ni blessures qui a été la victime des autres. Je médite souvent sur cette phrase qu’a lancée un ami un jour : « si l’Africain avait était à la place de l’Européen, qu’aurait-il fait ? » Je ne sais pas. La seule chose que je sais c’est que ces jeunes pseudo panafricanistes et illuminés détournent l’objectif principal et questionnent tout sauf ce qu’ils doivent questionner : l’Afrique. Ils passent le temps à nous casser le tympan sur les médias et sont complètement hors jeu parce que n’ayant pas saisi le véritable problème de l’Afrique. Ce sont, certes, des illuminés mais ils doivent apprendre l’Afrique dans ses mouvements et analyser cette Afrique en prenant en compte ces mouvements et son influence sur l’évolution des hommes et des femmes Africains sans se limiter à cela. Mais il y’a d’autres jeunes, porteur d’espoir.

 

La troisième catégorie de jeunes, la moins nombreuse est celle des nobles, des « veilleurs-junior ». Ces jeunes qui connaissent pleinement l’Afrique et qui, désormais posent le problème de l’Afrique  par elle-même tout en reconnaissant les pillages externes dont celle-ci est victime. Le gros de leur combat c’est l’Afrique elle-même. Ces jeunes qui, au quotidien, se battent à éveiller les consciences, à tirer la sonnette d’alarme, à interpeller les autres jeunes sur notre situation et les défis qui nous attendent. Leur combat se fait d’abord contre nos systèmes bloqués et monolithiques, ensuite contre les relations souterraines et machiavéliques entre ces systèmes et l’ex métropole. Ils utilisent plusieurs moyens pour atteindre leurs objectifs malgré les difficultés : la musique pour certains, l’écriture pour d’autres. Il y’en a qui utilisent les conférences, internet et même les marches de revendication pour fustiger un système et bâtir un autre. Vous les reconnaitrez très souvent par le fait qu’on ne leur donne pas assez de paroles parce que, disent-ils, ils sont subversifs. Ce qui nous renvoie une fois de plus à la fameuse idée maléfique de Maurice Kamto.  Voila des jeunes nobles, voila des jeunes qui passent très souvent leur temps dans des cellules parce qu’ils ont revendiqué ce qui leur revient de droit. Voila des jeunes sur lesquels il faudra compter car, à la différence des autres, ils maitrisent leur sujet, leur cible et ne sont pas hypocrites.

 

crédit image: Camer.be

 

Pour ceux qui ne sont pas encore arrivés au Cameroun et même pour ceux qui sont au Cameroun et n’avaient pas fait le constat, le voici. Il existe trois types de jeunes au Cameroun. Mais, loin de cette identification, je propose aux jeunes griots de faire le saut et la dialectique qui leur permettra de devenir des jeunes veilleurs car, si le Cameroun a besoin des jeunes, ce n’est surement pas des jeunes hypocrites qui ne font que danser et chanter comme les ainés font.

 

Courage à Hervé Nzouabet, Valsero, Vanessa Tchatchou et tous ces jeunes Camerounais qui se battent au quotidien, parfois au prix de leur vie, pour défaire et débloquer les nœuds et les blocages actuels !

 

Ulrich K. Tadajeu



04/09/2012
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