L\'Afrique peut!

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« Autours » et alentours d’une fête de la jeunesse

NB: ce billet a été publié pendant la période de la fete de la jeunesse dans notre pays, en février dernier

 

Comme  il  est  de  coutume  depuis  près  de  46 ans, la  jeunesse  camerounaise  a  vibré  hier  au  rythme  de  la  fête  qui  lui  est  consacrée. Une fête  de  la  jeunesse  qui  connait  toujours  des  décors  et  des  rythmes  hors  du  commun. Cette  année, c’est  certainement  le  forum  de  la  jeunesse  organisé  à  Yaoundé  qui  aura  marqué  plus  d’un. Mais un  autre  évènement  non  moins  reluisant  se  sera  affirmé : l’affaire  Vanessa  Tchatchou. Dans ce billet, nous  revenons sur  sur  ces  « autour »  de  la  fête  de  la  jeunesse  qui marquent la singularité de la  « postcolonie » Camerounaise.

 

Fête  de  la  jeunesse, on  en  parle et  on  en  reparle. C’est  peut-être  une  spécificité de   mon  pays. On  célèbre  la  jeunesse. Ce  serait  un  signe  de  gratitude  pour  cette  partie  de  la  population  qui en  représente  plus  de  la  moitié. Cette  année, le  rendez-vous  a  été  honoré. Le  dispositif  protocolaire  était  sur  pied. Mais  le  Forum national  des  jeunes  s’y  est  inscrit. Ce  Forum  est  revenu  sur  l’insertion  socio-économique  de  la  jeunesse  camerounaise. Il  se  pourrait  que  la  jeunesse  camerounaise  ne  s’est  pas  encore  insérée  et  les  recommandations de  ce  forum, disent-ils, seraient  d’un  atout important pour  la jeunesse représentée  pour la circonstance par  près  de  1700 compatriotes. S’en-sont  suivis , un  peu  partout  sur  l’étendue  du  territoire,  des  Forums  organisés  par  le  FNE ( Fond National de l’Emploi)  sur  l’emploi  en  milieu  jeune, des  conférences  d’information  sur «  la  place  des  jeunes  dans  les  grandes  réalisations  pour  un  Cameroun  émergent ». C’est d’ailleurs  le  thème  qui a été retenu pour cette 46eme édition de la fête de la jeunesse. Il  se  pourrait  que  cette  contrée  jadis  appelée  « Cameroun » par  les  portugais  s’est  engagé  cinquante  année  après  son  indépendance  sur  la  voie  de  l’émergence. «La  Jeunesse  en serait  le  principal  artisan » comme l’a dit  le « Nkunkunma ». on  a  entendu  à une  conférence  un  responsable  dire  qu’il  fallait organiser  ces  rencontres  pour  que  les  jeunes  ne  soient  pas  influencés  par  ce  qui  se  passe  au  Maghreb mais  qu’il  reste  dans  les  voies  démocratiques. Le  fameux  concept  de  « paix »  est  revenu  et nous pouvons questionner sa signification  en terre camerounaise.

 

En  plus  il  y’a  ce  fameux  discours. Il  est  traditionnel  mais  on  ne  sait  pas  depuis  quand  remonte  la  tradition. Ce  qu’on  sait  c’est  que  le  chef  de  l’état  s’est  adressé  à  ses  jeunes  compatriotes. On  ne  sait  pas  non  plus  depuis quelle contrée ou quel  lieu il  l’a fait. Chez  nous  on  dira que  ce  n’est  pas  important  et  comme  son  ministre  de  la  communication  aime à   le  dire : peu importe où il se  trouve  dans  le  monde, l’essentiel est  qu’ il  sert  la  République. Pour  ceux  qui  s’en  doutaient, on peut  rester  à  l’étranger  et  servir  ses  jeunes  compatriotes. Quoi de  plus  normal  quand  on  se  trouve  dans  ce  qu’Achille Mbembe appelle « le gouvernement  spectral ». vous  voyez  donc,  qu’il soit  au  Cameroun  ou  en  occident, qu’il  ait  commencé  ses  discours  hier  ou  aujourd’hui, on  vous  dira  ici  chez  nous  que  ce  n’est  pas  important. Ce  qui  est  important  semble-t-il  c’est  le  discours. 

 

Mais  avant  d’arriver  à  ce  discours, faisons  quand  même  quelques  remarques :  notre  « cher  président fondateur » a  quitté  la  maison  le  31 janvier  dernier  pour  un « court  séjour privé » en  Europe  et  il  n’est  pas  encore  de  retour. Sauf  si, il  est  revenu  discrètement  parce  que  quant il  revient, « tout  est  bloqué  à  Yaoundé, le nom  de  la  capitale  de  notre Gondwana ».  Cela  veut  dire  que  c’est  depuis  son  second  pays  que  le  président  de  notre  République  se serait  adressé  à  cette  jeunesse  à  laquelle  il  dit  attacher  un  très grand  intérêt  et  une  estime  particulière. On  vous  dira  aussi  que  ce  n’est  pas  important  mais  comme  je  vous  l’ai  dit, il  faut  relater  les  faits. Parlant  de  faits, nous  sommes  rentrés  dans  nos  archives  et  nous  nous sommes  rendu  compte  que cela  a  déjà  été  fait  par  le  passé. Donc  ce  n’est  pas  une  innovation  politique. On  peut  être  président  et  s’adresser  à  ses  jeunes  compatriotes  ailleurs  ou  enregistrer  avant  de  se  lancer  dans  des  séjours  privés. C’est  un  moindre  mal. Le  Cameroun n’est-il pas  le  Cameroun ? Revenons  tout  même  sur  ce  discours  parce  qu’il est très  important.

 

Parlant  de  ce  discours, il  faut  saluer  notre président  qui  fête  ses  79ans  demain de  n’avoir  pas  fait  une  offre  cette  année. Beaucoup  de  jeunes  amis  attendaient  soit  26 000 emplois  ou  alors  les  primes  d’excellence  peut-être 60 000 FCFA  cette  année. Mais  c’est  un  état  des  lieux  de  sa  maison  que le  Père  a  fait. Peut-être  que  l’éducation  est  porteuse  pour  l’emploi  et  qu’il  s’en est rendu  compte, il  nous  a  cité  ce  que  notre  pays  a  comme  infrastructures  sur  ce  plan. Par  la  suite, il  a  parlé  du  sport  en  postcolonie pour  dire  qu’il  y’aura  l’aménagement  des  infrastructures  dans  ce  sens. Comment  ne  pas  finir  par  les  structures  qui  prennent  en  charge  la  recherche  de  l’emploi  en  cette  terre ? Il  s’en  est  appesanti. il  a  plus  encore  inscrit  le  terme  de «  patriotisme  économique » dans  le  jargon  politique  camerounais. C’est  de  bonne  guerre. On  aurait  cru  le  ministre  de l’éducation  nationale  s’exprimer. C’est  donc  un  discours  qui  fait  des  constatats  sur  la  vie  de  notre  éducation  à  tous  les  niveaux  mais  qui  n’annonce  rien. Certains  me  demanderont  si  c’est  apte  à  susciter  de  l’optimisme. Je  leur  renverrais  la  question  à  savoir : veut-on  susciter  de  l’optimisme  chez  nous ? Du  moins  c’est  un  discours  « d’ailleurs »  de ce  pays  qui  est  notre. Mais  qui  donne  des  arguments  psychologique  parmi  lesquels : « je  suis, tu  es  et  nous  sommes  artisans  de  la  République  Exemplaire ».  Même  si  on  ne  sait  pas toujours  en  quoi  cette  République  exemplaire  consiste. Du  moins, les  événements  pré fête  de  la  jeunesse  ne  nous  aident  pas  à  en savoir davantage . Parmi ces  évènements, il  y’a  l’affaire  Vanessa Tchatchou.

 

 Cette  affaire  de  bébé volé  dans  un  hôpital  très  reconnu  de  la  capitale  camerounaise  et  la  gestion  qui  en  est  fête  sont –elles  des  caractéristiques  de  la  fameuse  République  exemplaire ? S’agit-il  donc  d’une  République  exemplaire  par  le  bas ? Très  souvent  en  postcolonie, on  n’aime  pas  le  bruit  encore  moins  les  rassemblements  du  genre  plus  de  trois  personnes. Que  vous  soyez  jeunes  ou  vieux. Plus  encore, les  jeunes, on  vous  dira  que votre  place  est  dans les  amphis  et   qu’il  ne  faut pas mettre  à  mal  la  paix, mais  si  vous  faites  une  marche  de  soutien  au  père  même  s’il  n’est  pas  en  terre  natale, on  peut  vous  retirer  des  amphis  pour  que  vous  vous  y  joignez.

 

 Vanessa  Tchatchou, c’est  cette  jeune  sœur  de  17 ans  qui  a  accouché  d’une  fille  en  Aout  dernier  dans  un  hôpital  de  la  capitale  camerounaise.  Cet  hôpital, assez  prestigieux, est  le  fruit  de  la  coopération  sud-sud. Ce  soir  d’aout  2011,  son  bébé  a  disparu  et  elle  n’est  plus  sortie  de  l’hôpital  jusqu’à  aujourd’hui. Elle  veut  son  bébé  avant  de  sortir. Des  jeunes  s’y  sont  mêlés,  accompagnés  d’homme  politique  pour  compatir  à  la  douleur  que  peut  ressentir  Vanessa  et  ont  décidé  de  la  soutenir  à  travers  une  marche  devant  l’hôpital  qui  aurait  du  avoir  lieu  le  9 Février  dernier. Seulement  comme  je  vous  le  disais, chez  nous  au  « Mboa », on  n’aime  pas les  rassemblements  et  ces  jeunes  s’en  sont  rendus  compte. Petit  séjour  dans  un  commissariat  de  la  place. Et  si vous  vous  questionnez, on  vous  dira  qu’il  ne  faut  pas nuire  à  la  paix. N’allez  pas  vous  questionner  sur  ce  terme  parce qu’il  fût  un  temps, on  l’entendait  à  tout  bout de  chemin,  à  tous  les  coins  de  rue  et  sur  toutes  les  affiches. On  aurait  cru que  cette contrée  jadis  confiée  à  la  vierge  Marie avait  eu  pour  second  nom  la  « République  de  Paix ».  De  toutes  les  façons, nous  n’y  sommes  pas  encore, revenons  à  notre  République  exemplaire  qui  veut  être  émergente  dans  deux  décennies  environ.

 

Voila  les  faits  et  gestes, l’animosité  et  l’ambiance  qui  a  entouré  la  fête  de  la  jeunesse  chez  nous  en  postcolonie  camerounaise. Bien  que  certains  ne  savent  pas  ce  qu’ils  fêtaient, ils  étaient  heureux et  joyeux, plein  de vie  et  de  sang  froid. Ce  qui  justifie  au  moins  une  chose, c’est  que  la  jeunesse  camerounaise  est  prête  à  entrer  en  possession de  son  futur  et  d’être  véritablement  artisan  de  la « République Exemplaire » gage de  l’émergence  du  Cameroun. Ceci passera  par  une  prise  en  compte  de  ce  qu’elle  pense  dans  sa totalité  et  surtout  à  travers  une  redéfinition  du  patriotisme  économique  et  du  patriotisme  lui-même. Il  faut  aussi  que  les  dirigeants  cessent  de  dire  ce  qu’ils  ne  font  pas  et  qu’ils  apprennent  à  faire  ce  qu’ils  disent. Nous,  en  postcolonie,   sommes  jeunes, nous  observons  et  ce  que  nous  avons  observé  ces  derniers  moments  ne  sont  pas  assez  gais. Beaucoup  de  jeunes  compatriotes  n’ont  pas  confiance  en  eux  et  beaucoup  d’autres  pensent  que  c’est  une  réalité. Chacun  essaye  de  dire  quelque  chose pour  qu’on  l’entende  peut-être, mais  d’autres  ne  disent  rien  du  tout  pas  parce  qu’ils  ne  veulent  pas  qu’on  les entende. Chacun  dit : « il  faut  que  la  jeunesse  fasse si, fasse ça… », « Il  faut  que  … ». Seulement  ces  gens  qui  se  disent  jeunes font  quelques  fois  abstraction  de  nos  réalités. Le  patriotisme  ne  s’invente  pas, il  se  cultive. Ce  que  nous  apprenons  et  entendons  nous  aide  à  raviver  notre  patriotisme. Les  modèles  qu’on  se  fait, les  modèles  que  la  société nous  impose, la  société  dans  laquelle  nous  nous  trouvons  nous  aide  à  raviver  ce  patriotisme. Mais  dans  une  Res Publica  comme  la  nôtre  où  on  a  tué  nos  héros, les  vrais  patriotes, on  veut  que  les  jeunes  soient  patriotes. Ce  que  ces  jeunes  écoutent  et  voient  chaque  jour : «  tel  a  volé, tel  a  détourné… », «les  jeunes  personnes  qui  défilent  indécemment  partout  dans  les  rues  et  qu’on  célèbre malheureusement»  et  on  parle  de  patriotisme, alors  il  y’a  un  problème  de  fond.

 

Beaucoup  de  jeunes  parmi  lesquels  moi ne  savent  pas  pourquoi  ils  défilent  le  11 février  et  on  parle  de  patriotisme ? Concernant  ce  dernier  point, mes  prochaines  recherches  s‘orienteront dans cette  direction. Nous  avons  du  chemin  à  parcourir, nous  devons  nous  insérer  dans  un  système  socio-politique  et  économique, nous  devons  franchir  les  paliers  et  bouleverser  les  certitudes  établies. Nous,  jeunes  camerounais, pouvons  le  faire  si  nous  osons, innovons  et  créons, certes  mais  plus  encore  si  nous  sentons  que  « oser, innover  et  créer » auront  servi  à  quelques  chose. Pour  cela, il  ne  faut  plus  qu’on  rêve  et  il s’agit du   premier  coté  de  ce Rêve. Le  second, je  le  développerai  dans  un  autre  billet. Ce  premier  coté  du  rêve  consiste  à  toujours  se  dire : «  qu’est ce  que  je  fais  pour  ma  société ? » il  faut  se  le  dire, mais  il  faudrait   aussi  que  l’Etat  se  demande : «  qu’est  ce  que  je  fais  pour  ces  jeunes ? » Parce  que  si  les  jeunes  seuls  se  posent  la  question, alors  on  arrivera  à  ce  qui  se  passe  actuellement  et  le  débat  sera  faussé.

 

Ces  alentours et  autour  de  la  fête  de  la  jeunesse  sont  tantôt  joyeux, tantôt  tristes. Mais  notre  intention, après  avoir  constaté  ces  faits  a  été  surtout  de  remettre  les  pendules  à  l’heure  et  à   inviter  les  jeunes  compatriotes  camerounais  à  prendre  leur  destin  à  main  à  oser  tout  en  sachant  qu’il  faut  bousculer  les  certitudes  établies. Mais  plus  encore  à  inviter les  pouvoirs  publics  à  oser  autant  que  les  jeunes  pour  que : volonté politique + audace des Jeunes = République Exemplaire,  gage  d’un  Cameroun  émergent  en  2035  et  peut-être, pourquoi pas, bien  avant.

                                                                         

   Ulrich K. Tadajeu



24/08/2012
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