L\'Afrique peut!

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Notre « leader bien aimé » ne doit pas démissionner

 Conseil d’un Camerounais à son « leader bien aimé » au sujet de sa prétendue démission

 

 

 

 

 

Je lance cette rubrique, « relisons la presse » avec un article de presse que j’ai lu tout récemment, tiré de l’Hebdomaire Emergence  dans sa livraison n°110 du 27 Aout au 02 Septembre 2012. Il s’agit de l’article de Magnus Biaga « Biya veut démissionner » en page 5.

 

 

La une du journal l'Emergence.

 

Dans cet article, l’auteur par ailleurs directeur de publication de l’hebdomadaire, s’appuie sur les phrases que le président du Cameroun a adressées à certains acteurs de la scène internationale et partenaires étrangers et surtout le discours du chef de l’état concernant l’image que ce dernier veut laisser au Cameroun pour prédire la démission de Paul Biya comme son prédécesseur Ahmadou Ahidjo en 1982.  Les deux leaders à qui le chef de l’Etat se serait adressé, selon Magnus Biaga, sont Hu Jin tao de la Chine et Ban Ki Moon de l’ONU. C’est la raison pour laquelle les photos de ces deux leaders apparaissent autour de celle de Paul Biya en Une du Journal.

 

Tout se serait passé avant l’échéance présidentielle de l’année dernière.  «Président-fondateur » aurait confié à ces deux leaders qu’il s’agirait de son dernier septennat. Juste le temps pour lui d’ « assainir le Cameroun » et de laisser un pays dont on sera fier. L’autre exemple qui vient étayer l’argument du journaliste, c’est le discours du président Camerounais relatif à l’image qu’il veut laisser du Cameroun. Reprenant trois phrases de Paul Biya (Radio Monte Carlo, 1990 ; Niels Marquadt ; Louis Tobie Mbida), Magnus conclut que le président du Cameroun est soucieux de l’image qu’il laissera au Cameroun et confirme sa volonté d’assainir le climat politique au Cameroun quelques années avant de partir se reposer dans son village.  Mais le climat politique actuel du Cameroun ne confirme pas cette volonté d’assainir, selon le directeur de publication d’émergence : une rupture nord-sud avec l’affaire Marafa, un gouvernement en prison. Le président Paul Biya aurait, tout de même, intérêt à démissionner car, en mettant un remplaçant ou un dauphin à la tête de l’Etat, il assurerait ses arrières et pourra se reposer librement sans poursuite et sans traque pour les siens (famille). En plus, la démission serait une occasion pour lui de rester en bon terme avec les partenaires étrangers parmi lesquels la Chine. Il finit, en proposant au Chef de l’Etat de démissionner au risque d’être isolé par ses « proches collaborateurs et d’être traqué par la communauté internationale. »

 

 

L'article au sujet de la démission de Paul Biya.

 

Je pense que, malgré la kyrielle d’exemples que prend le journaliste pour démontrer et illustrer sa position, le climat politique actuel du Cameroun ne favoriserait pas la démission de son « leader bien aimé ». Les batailles nocturnes et souterraines autour de la succession du président Biya donnent plutôt l’impression qu’une démission dans deux ou trois ans serait plus une boite de pandore qu’un assainissement du climat politique.

 

 Ensuite, au sujet de la Chine, je me questionne sur cette position que Magnus Biaga prête à la Chine. Nous savons très bien que les questions de politique interne des Etats n’intéressent pas tellement cette nouvelle puissance (Cf. Charles Ateba Eyene, La pénétration de la Chine en Afrique et les espoirs de la Rupture coloniale. Pour une coopération sino-camerounaise en béton, Yaoundé, St Paul, 2010). Si le climat est favorable au bon déroulement de leur commerce, la durée du président ne les intéresse pas trop. On l’a vu un peu partout en Afrique pendant les crises. Dès qu’une crise est déclenchée, ils portent leurs marchandises et font demi-tour. Si la crise se calme, ils reviennent. Ce sont des commerçants qui n’ont pas grand-chose à faire avec la politique. Par ailleurs, les hypothèses que je formulais à la veille de la dernière présidentielle selon lesquelles les principaux électeurs de notre président, cette année, allaient être la communauté internationale semblent se confirmer. Toutes les allusions faites par le journaliste montrent que c’est avec la communauté internationale que le « Chef suprême » aurait négocié son maintien au poste de président de notre pays. Qu’en est-il du peuple ? La légitimité de notre chef de l’Etat viendrait-elle de son peuple ou de la communauté internationale ?

 

Enfin, la redondance dans le discours de Paul Biya de l’image qu’il aimerait laisser au Cameroun n’est pas, à mon avis, un argument plausible  qui montrerait qu’il est sur le départ.  Rappelons quand même que c’est en 1990 qu’il prononça cette phrase pour la première fois  sur les antennes de RMC (Radio Monte Carlo). Il souhaitait laisser l’image de celui qui a apporté la démocratie et la prospérité. Depuis cette date, il ne l’a pas fait car la démocratie reste lettre morte et comme l’a dit un leader politique, il n’ya pas longtemps : « Le Cameroun est dans la préhistoire de la démocratie » Garga Haman Adji, Mutations n°3231, vendredi 31 aout 2012, P5.  Si le chef de l’Etat le rappelle, on ne peut pas attendre mieux car c’est un discours qui date de deux décennies. Il faut rappeler que c’est après avoir rappelé cela que le Cameroun est entré dans une décrépitude démocratique(1992) et  socioéconomique (1990-2000) sans pareil.  La pauvreté, le chômage, la corruption, les détournements, atteintes au droits et libertés individuelles et collectives.

 

 Le départ de Paul Biya qui serait à l’ordre du Jour dans les années à venir, selon Magnus Biaga est un mauvais choix politique et une lâcheté même si il arrivait à être confirmé. Ce que les Camerounais attendent du leader bien aimé, ce n’est pas une démission qui laisserait un pays en ébullition emporté par les luttes de positionnement et de succession. C’est plutôt l’assainissement vrai et véritable du climat politique afin d’organiser un jeu électoral transparent avec des règles égales à tous les acteurs du champ. Voila ce que les Camerounais attendent et non pas un deal passé avec une communauté internationale qui ne sait pas comment vit la paysan de madingring ou de pitoa, de Fosso-wontcheng ou de Bana. Si mon avis peut parvenir à son excellence, je lui conseillerai de ne pas encore démissionner s’il en avait l’intention. Mais de prendre ces sept ans pour définitivement marquer l’Histoire de notre pays afin que la postérité le reconnaisse, non pas comme celui qui fut le second président de notre Etat, mais comme celui qui a véritablement apporté la prospérité à notre pays.

 

NB : J’emprunte le terme « leader Bien aimé » et  «président-fondateur" à Mamane dans sa Chronique quotidienne sur Radio France Internationale (RFI).

 

 

 

Ulrich K. Tadajeu



20/09/2012
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